" Une installation au GNL apporte vraiment du confort "
Les établissements Barrault ont abandonné le charbon au profit du gaz naturel liquéfié. Cette énergie est désormais disponible dans le grand ouest de la France grâce à la mise en place, il y a trois ans, d'un terminal méthanier sur la Loire. Une solution intéressante pour ceux qui ne peuvent pas se raccorder au réseau.
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Par quelle énergie remplacer le charbon, trop polluant et désormais trop taxé, pour chauffer 3 hectares de serres ? Même si les établissements Barrault, établis à La Possonnière, à une vingtaine de kilomètres à l'ouest d'Angers (49), ont limité au minimum la consommation d'énergie, en réduisant les températures de consigne et en développant des cultures de vivaces peu gourmandes en énergie, les plantes vertes et surtout la multiplication, qui permet à l'entreprise d'être autonome pour 90 % de sa production, exigent de la chaleur. La question s'est donc posée de remplacer deux chaudières au charbon de plus de 4 070 kWh et c'est sur un choix atypique que les dirigeantes ont jeté leur dévolu : le gaz naturel liquéfié (GNL), qui alimente le réseau de « gaz de ville », mais est livré sous forme liquide : utile quand on ne se trouve pas dans une zone desservie !
Plusieurs alternatives ont été étudiées. Le bois, évidemment, dans lequel nombre d'entreprises investissent aujourd'hui. Mais l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), consultée sur ce point, a découragé Claire et Véronique Barrault, aujourd'hui responsables de l'établissement : de nombreuses structures y ont désormais recours et il faudrait aller chercher la ressource à plus de 150 km, ce qui devient irréaliste économiquement. La société avait aussi été démarchée pour une cogénération. Mais la consommation d'énergie se limitant des mois d'octobre à avril, ce n'était pas suffisant pour rentabiliser l'installation. Quant au propane, dérivé du pétrole, il est plus cher que le gaz naturel... Enfin, le fioul lourd n'a pas été envisagé car une chaudière tourne déjà avec et l'objectif était d'avoir une énergie complémentaire.
Un coût comparable à celui du gaz naturel. C'est une opportunité locale, la création il y a trois ans d'un terminal méthanier à Montoir-de-Bretagne (44), sur l'embouchure de la Loire, en aval de Nantes (44), qui a permis de trouver une solution au problème. En France, le réseau de « gaz de ville » s'est largement développé à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. Du coup, les terminaux méthaniers n'y ont jamais vraiment eu d'utilité et celui de Montoir-de-Bretagne reste pour l'instant unique en France. Ce n'est pas le cas en Espagne, par exemple, où le réseau n'a pas été développé et où il existe une expérience de cette énergie. Et c'est sans surprise une entreprise espagnole, Molgas, qui a supervisé la réalisation de l'installation. « Nous comptons de plus en plus de producteurs, essentiellement des maraîchers, qui passent au GNL, explique Erwan Payen, qui a suivi le dossier des établissements Barrault. Le coût est comparable à celui du gaz naturel, avec un peu de logistique, puisqu'il faut assurer les livraisons, mais il n'y a pas d'abonnement. » Ces clients, qui souvent quittent des énergies polluantes comme le charbon ou le fioul lourd, cessent leurs émissions de soufre tout en réduisant leurs émissions de CO2, d'oxyde d'azote et de particules fines.
À distance, Molgas détermine les besoins d'approvisionnements qui peuvent être assurés à tout moment. Le stockage disponible permet de chauffer les serres de l'entreprise pour une durée d'approximativement 15 jours en cas de coup de froid. Un open buffer de 250 000 l chauffés à 81 °C permet de parer les coups de froid du matin et d'assurer le début du chauffage de la nuit. Il a demandé un certain réglage : « Au début, nous chauffions trop. Il a fallu baisser la température de fonctionnement », explique Claire Barrault qui a toujours suivi de près les problèmes liés au chauffage. Elle se souvient de l'utilisation du charbon : « Nous avions des soucis. Il fallait faire tourner la chaudière à plus de 100 % de sa capacité. Nous avions de la casse et beaucoup de mâchefer. L'installation au GNL apporte vraiment beaucoup de confort par rapport au charbon. C'est un bon complément du fioul lourd. »
Aucune aide des pouvoirs publics. Les 250 000 euros d'investissements que représentent le stockage et le réchauffement du gaz ont été assurés par la société Molgas qui fait ensuite payer un loyer aux établissements Barrault. Ces derniers ont pour leur part financé 140 000 euros représentant le coût de la chaudière et des systèmes électrique et hydraulique permettant leur fonctionnement. Si l'on y ajoute le local dans lequel la chaudière est installée et tout ce qui environne le projet, environ 800 000 euros ont été investis. Le tout sans la moindre aide nationale, FranceAgriMer ayant jugé le dossier pas suffisamment novateur. Ce que les dirigeantes de l'entreprise et leur père Michel Barrault, qui aujourd'hui est en train de leur céder les rênes, ont du mal à entendre : « Personne dans le domaine horticole n'est aujourd'hui équipé en GNL. Nous sommes les premiers. Mais actuellement, les enveloppes de subventions sont récupérées à 95 % par des maraîchers pour des serres hollandaises, c'est décourageant. » D'autant plus que c'est le troisième refus qu'essuie cette structure en quelques années. « Le métier d'horticulteur ne bénéficie plus d'aucune aide des pouvoirs publics dorénavant. Or, elles permettent des investissements qui sont indispensables pour que les entreprises restent compétitives », lâche, amer, Michel Barrault. Et étant donné que les subventions régionales sont conditionnées aux aides nationales, le refus de FranceAgriMer est une double peine.
Se conformer à l'évolution du secteur et anticiper les futurs besoins. Il est encore trop tôt pour dresser un bilan de l'installation de chauffage au GNL mise en place par les établissements Barrault dans le courant de l'hiver dernier. Une saison qui a été peu rigoureuse mais s'est éternisée : il a fallu chauffer tardivement pour pallier le manque de soleil et corriger l'excès d'humidité. « Notre budget de chauffage tourne autour de 300 000 euros, soit entre 3 et 4 % du chiffre d'affaires, précise Claire Barrault. Notre objectif est de maintenir ce budget. » En attendant, le prochain investissement devrait se tourner vers une nouvelle surface couverte pour améliorer davantage la qualité des produits. Mais, après un printemps difficile au cours duquel l'entreprise n'a jamais autant jeté de plantes, cet investissement attendra. Pour l'instant, la question qui interpelle Claire Barrault concerne l'avenir : « Que produire, pour quel consommateur ? Il faudra être opportuniste. » Elle observe que les soldeurs de plantes, qui achètent à tout-va à l'étranger, sont de plus en plus nombreux autour d'Angers. Que les jeunes se font plus rares dans les formations horticoles. Le contexte évolue. L'entreprise a su adapter son système de chauffage, gageons qu'elle saura faire de même pour sa production.
Pascal Fayolle
Bien qu'elle produise beaucoup de plantes peu gourmandes en énergie (des vivaces), l'entreprise chauffe le secteur de la multiplication des végétaux et les plantes vertes, avec 95 % de GNL (gaz naturel liquéfié) et 5 % de fioul lourd.
La trémie qui servait à stocker le charbon n'a pas encore retrouvé d'usage.
Deux chaudières ont été installées pour assurer le chauffage de 3 hectares couverts.
Les établissements Barrault produisent 4 millions de plantes à massifs de printemps.
L'open buffer de 250 000 l couvre les besoins de chauffage du début et de la fin de nuit.
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